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segunda-feira, 28 de fevereiro de 2011

Annie Girardot ne bois plus,ne fume plus.


Lembro-me de a ver em tantos filmes...

L'actrice Annie Girardot est morte «paisiblement» lundi à l'hôpital Lariboisière à Paris, à l'âge de 79 ans.

Annie Girardot le 19 mars 2006 lors de la soirée de clôture du festival du film d'action et d'aventure de Valenciennes où elle a reçu le prix "coup de coeur". - AFP Carl de Souza

L'actrice Annie Girardot est décédée lundi à l'hôpital Lariboisière à Paris, à l'âge de 79 ans, a annoncé à l'AFP sa petite-fille Lola Vogel. «Elle est partie paisiblement. Maman et moi étions à ses côtés», a déclaré Lola Vogel, petite-fille d'Annie Girardot.

Elle était devenue un symbole de la maladie d'Alzheimer dont les ravages étaient apparus dans Ainsi va la vie, documentaire de Nicolas Baulieu qui l'a filmée pendant huit mois. «Aujourd'hui, Annie ne sait plus rien d'Annie Girardot», concluait-il.

Née le 25 octobre 1931 à Paris, Annie Girardot entre au Conservatoire de Paris, après son baccalauréat et des études d'infirmière. Elle y remporte le premier prix de comédie en 1954, année où elle intègre la Comédie Française pour interpréter notamment La machine à écrire de Jean Cocteau.

Parallèlement, elle fait ses débuts au cinéma avec Treize à table de André Hunebelle, en 1955. Deux ans plus tard, elle quitte la Comédie Française, et se lance dans le théâtre de boulevard avec Deux sur une balançoire, mis en scène par Visconti.

Après quelques films commerciaux, Rocco et ses frères toujours de Visconti (1960) lance véritablement sa carrière au cinéma. Jouant beaucoup, elle s'illustre notamment dans Le mari de la femme à barbe (1963), Dillinger est mort (1969) de Marco Ferreri, Vivre pour vivre de Claude Lelouch (1967), ou encore Mourir d'aimer d'André Cayatte (1971).

La voici dans un extrait de Déclic et des claques, un film de Philippe clair sortie en 1964 :

En 1969, dans une émission télé, Annie Girardot parle du conservatoire et de son passage à la Comédie Française où elle a joué les soubrettes :

Dans les années 70, elle enchaîne les comédies populaires, où les réalisateurs usent et abusent de sa gouaille naturelle : avec Michel Audiard dans Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas, mais... elle cause !, avec Philippe de Broca dans Tendre poulet en 1977 ou On a volé la cuisse de Jupiter en 1980, ou encore avec Claude Zidi dans La Zizanie en 1978.

En 1977, elle est couronnée par le César de la meilleure actrice pour son rôle dans Docteur Françoise Gailland (Jean-Louis Bertucelli). Extrait du film :

En 1982, sa revue au Casino de Paris est un échec et, hormis quelques rôles remarqués – Liste noire (1984), Partir revenir (1985), Comédie d'amour (1989) – elle disparaît quasiment du grand écran au début des années 80. Elle se consacre alors au théâtre avec notamment L'avare (1986), Descente aux plaisirs (1997), Le 6ème ciel (1998), et à la télévision avec de grandes sagas comme Le vent des Moissons ou Orages d'été.


En 1996, elle est récompensée par le César du meilleur second rôle dans Les Misérables de Claude Lelouch, après avoir été longtemps boudée par la profession.

Lors de la cérémonie des césars, elle fond en larmes en prenant la statuette, se livrant complètement : «Je ne sais pas si j'ai manqué au cinéma français, mais à moi, le cinéma français a manqué. Follement, éperdument douloureusement. Votre témoignage, votre amour me font penser que peut-être, je dit bien peut-être, je suis pas tout à fait morte.» Voici un extrait des Misérables et sa déclaration aux Césars.


En 2002, elle reçoit un nouveau César, celui du meilleur second rôle féminin pour La pianiste de Michael Haneke. La même année, le Molière de la meilleure comédienne lui est décerné pour Madame Marguerite. Libération lui consacre alors un portrait intitulé «sans filtre».

Annie Girardot était divorcée de l'acteur italien Renato Salvatori (décédé en mars 1988), le père de sa fille Giulia. Cette dernière lui consacrera un livre en 2007 la Mémoire de ma mère, évoquant sa maladie d'Alzheimer, racontant les quelques rares moments de lucidité d'Annie Girardot, les soins et les difficultés financières qui en découlent, l'actrice ne touchant à l'époque qu'une retraite de 900 euros par mois. C'est en 2006 que sa famille avait révélé la maladie, diagnostiquée deux ans plus tôt.

(Source AFP)

terça-feira, 11 de maio de 2010

O Esbulho Nacional.

 

 

Obligation de service précaire

grand angle

Au Portugal, plus de 18% des agents de l’Etat sont assimilés à des travailleurs indépendants. Licenciables à tout moment sans indemnités chômage ni congés payés.
Par FRANÇOIS MUSSEAU Envoyé spécial à Porto (Portugal)

 
Francisco Guimarães s’est juré qu’à la première occasion, il ramènera sa petite famille au Luxembourg où il a vécu sept ans. Là-bas, il menait «la vie normale et décente» d’un professeur de musique sorti du conservatoire avec les meilleures notes en guitare classique. Salaire correct, 400 euros mensuels d’indemnités pour chacun de ses deux enfants, un emploi stable et une vie culturelle intense. Il y a trois ans, le cancer de sa belle-mère l’oblige à revenir à Porto. Depuis, c’est la dégringolade.
Francisco a dû passer par une entreprise de travail temporaire (ou ETT)pour retrouver un poste de professeur, mais précaire. Vacataire au collège São-Miguel-de-Novogilde, payé à l’heure, 11 euros, une somme dont il lui faut défalquer 4 euros de sécurité sociale et d’assurance privée. Les bons mois, en cumulant son salaire et celui de sa femme, professeure d’anglais également vacataire dans le même collège, le couple plafonne à 900 euros net. Mais il y a les mois creux, Noël, Pâques, les vacances d’été, et là, les revenus plongent. Bien sûr, il donne des cours particuliers, bosse comme barman les jours fériés, est prêt à n’importe quel job.«On a 1 800 euros de frais fixes, entre l’appartement, les enfants, la nourriture et les charges. Comment voulez-vous faire ?»
La trentaine, Francisco se sait au bout de la chaîne de la précarité dans la fonction publique : le ministère de l’Education sous-traite les embauches aux municipalités qui elles-mêmes s’adressent à une ETT, en l’occurrence Edutec, spécialisée dans le recrutement de personnel enseignant.Cette ETT, il compte bien la dénoncer en justice, au nom de tous ceux qui préfèrent se taire par peur de perdre leur travail. «Cette entreprise m’a menacé de me rayer des listes si j’élevais la voix. Mais je m’en fiche. On a touché le fond. J’ai étudié pendant dix ans pour devenir un bon professeur. J’ai aussi rêvé, pourquoi le cacher, d’être fonctionnaire, avec la stabilité, la sécurité, les congés. Tous ces efforts pour en arriver là, à être payé avec des reçus verts ! La honte !»
Le reçu vert, el recibo verde : c’est le sceau qui estampille, au Portugal, une génération entière, le synonyme de la précarisation extrême du travail, la traduction directe d’une économie en chute libre après une décennie de stagnation économique, victime à présent de faiblesses structurelles aussi inquiétantes qu’en Grèce.
Concrètement, les reçus verts se présentent en coupons détachables que le travailleur présente chaque mois à son employeur. Ils sont la clé de voûte d’un systèmeaux antipodes du contrat de travail. L’employé doit travailler comme un salarié : respecter les horaires de l’entreprise, les contraintes de sa tâche, la hiérarchie. Mais, en revanche, il n’a aucun droit. Ni congés payés, ni 13e mois, ni congé maternité, pas de possibilité de se syndiquer, etc. Il devient un prestataire de service, obligé de facturer son travail à un patron qui, lui, se pose en client. Lequel est roi : il peut rompre à tout moment, sans verser d’indemnités chômage…
Créé dans les années 1980 pour les professions libérales (avocats, médecins, architectes…), le recibo verde a instillé de la précarité dans tous les secteurs. Il est aujourd’hui chose commune dans la fonction publique, dernier bastion de la stabilité de l’emploi. Sur les 5 millions d’actifs portugais, on compte 2 millions de precarios - CDD ou stagiaires longue durée. Parmi eux, 900 000 sont au régime du recibo verde, freelance malgré eux. Carmen Correia, 26 ans et cheveu de geai, professeure d’anglais à Porto, a elle aussi été recrutée par une ETT. Elle gagne en moyenne 700 euros par mois, doit payer la sécurité sociale (160 euros), le loyer (330 euros), le remboursement de son Opel Corsa (260 euros). En déficit permanent. «Heureusement, il y a mes parents qui m’aident, me donnent à manger, des vêtements. Quant aux loisirs, aux projets de vie, autant oublier !»
«Un pilier social qui s’effondre»
Carmen Correia et Francisco Guimarães font partie de la catégorie en plein essor des fonctionnaires ultraprécaires. Ils seraient environ 140 000, soit 18,4% des agents de l’Etat, à être payés en échange de recibos verdes. Et au bord de la révolte. Depuis 2009, les ultraprécaires s’invitent dans les marches du 1er Mai, derrière des syndicats qui ne les voient pas toujours d’un bon œil. Des jeunes recibos verdes ont fait des happenings sur des plateaux de télé, dans des centres commerciaux, leur grogne inonde la blogosphère. Tiago Gillot, ingénieur agronome, anime Précaires inflexibles, un mouvement qui défend, via Internet, ces travailleurs silencieux : «Le Portugal est le laboratoire social de la précarité à grande échelle, rongeant peu à peu la fonction publique. C’est un pilier social qui s’effondre, celui de l’emploi stable et garanti par l’Etat. Savez-vous que cette folie touche même l’inspection du travail ? Soixante-dix juristes de cet organisme de contrôle sont payés avec des reçus verts ! Surréaliste, non ?»
Sans salaire durant trois mois
Utiliser les reçus verts pour rémunérer des gens qui font un travail d’agent de l’Etat,«c’est illégal, et le gouvernement le sait. Mon propre chef, au ministère du Travail, l’admet», dit Cristina Andrade. Cette femme de 33 ans, installée à Porto, est certainement la militante la plus influente du pays. Psychologue, elle travaillait à l’IEFP (équivalent de l’ANPE) depuis 2004 en étant payée avec des recibos verdes. Elle et ses collègues ont obtenu l’an passé un CDD, accordé à titre exceptionnel, et à force de battage médiatique sur Internet.
Il y trois ans, Cristina Andrade a fondé Ferve, fartos destes recibos verdes («Ferve, ras-le-bol de ces reçus verts»), un blog qui connaît depuis un énorme succès. L’acronyme Ferve évoque en portugais l’incandescence, la fureur. «Sur les 16 000 offres de travail de la page web du ministère, seuls 600 ont un statut permanent. Certaines annonces offrent 2,50 euros l’heure dans des call center de Portugal Télécom, contrôlé par le gouvernement !» Cristina Andrade confie : «80% de nos internautes ont la peur au ventre. Ils exigent l’anonymat et refusent que leur histoire soit rendue publique. De crainte de perdre leur job.» Elle est leur bras armé. Poursuites judiciaires, tribunes dans les médias, lettres ouvertes aux députés nationaux… L’opiniâtreté de Cristina Andrade et de son mouvement Ferve a fini par égratigner l’image sociale du gouvernement socialiste de José Sócrates. Si bien que celui-ci, craignant sans doute pour sa réputation dans l’Union européenne, a corrigé le tir depuis la mi-2008 : le recours aux reçus verts disparaît, progressivement, de l’administration. Mais il cède la place à un système de sous-traitance qui crée tout autant de précarité, sinon plus.
«J’en suis la parfaite illustration», dit João Carvalho, 33 ans, licencié en histoire. Agent de l’Etat, il a été contraint il y a près de deux ans de fournir le même travail mais en tant que chef de sa propre entreprise ! En 2005, il avait été recruté pour administrer les archives d’architecture du nord du pays au sein de l’Institut du patrimoine, à Porto. En 2006, il conserve son poste mais se voit contraint de passer aux recibos verdes. Mi-2008, les dix architectes de son département sont mis à la porte. Pas lui. «Ma fonction est indispensable. C’est d’ailleurs pourquoi je peux ouvrir ma gueule publiquement.»
Le gouvernement a alors décidé de faire le ménage dans les recibos verdes honnis : João Carvalho est obligé, pour garder son emploi, de monter sa propre entreprise - dont il est l’unique chef et employé. Il choisit un nom au hasard dans le registre, ce sera Data Vintage. Pour constituer le capital social, 5 000 euros minimum, il reçoit l’aide de sa mère et d’un ami médecin. Se met à l’ingénierie comptable. Et découvre les joies de la PME. Parfois, son salaire ne tombe pas durant trois mois, l’angoisse monte. «Je facture 1 700 euros brut. Mais en réalité, dans ce système, je n’ai pas le droit de demander plus que le salaire minimum,460 euros, limite que je ne respecte pas, par nécessité. Si j’ai un contrôle fiscal, ça va faire mal !»
«Il y a de quoi devenir fou»
Deux ans ont passé. João Carvalho, séparé, père d’un garçon qui vit chez sa mère, est à bout de nerfs : «Evidemment, tout cela est une immense farce. Je fais le travail d’un fonctionnaire, je vis dans une précarité totale, mais j’ai le statut d’un architecte qui, chaque mois, facture un projet. Dans les statistiques nationales, je grossis la liste des chefs d’entreprise dynamiques. Je gagne toujours aussi peu, mais je rapporte davantage à l’Etat. Il y a de quoi devenir fou. Souvent, quand j’attends indéfiniment la paie, j’ai envie d’emporter l’ordinateur central de l’institut et de le saboter. Avec cette merde de paperasse et d’impôts à payer, j’en suis à regretter les reçus verts !»
Histoire d’assurer ses arrières, João Carvalho envisage avec des amis d’ouvrir un restaurant végétarien dans le vieux Porto. «Jamais je n’aurais imaginé ça. Mais quitte à monter une boîte, autant le faire pour de bon !»
Photos PIERRE-YVES MARZIN

sábado, 27 de março de 2010

Mais quoi?...











José Sócrates, le Portugais ensablé

Rien ne va plus pour le Premier ministre socialiste, dont le nom est associé à des affaires de corruption sur fond de crise économique majeure.
Par FRANÇOIS MUSSEAU envoyé spécial à Lisbonne
Le Premier ministre portugais José Socrates, le 7 janvier 2010 à Paris
Le Premier ministre portugais José Socrates, le 7 janvier 2010 à Paris (AFP Remy de la Mauviniere)
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L’inimitié d’une bonne partie des médias, une crise politique qui tourne au blocage institutionnel, une situation sociale explosive, un fiasco économique obligeant à des mesures drastiques à court terme… Comme si cela n’était pas suffisant, le bouillant José Sócrates (mollement réélu aux législatives de septembre 2009) doit désormais affronter une fronde du Parlement qui pourrait le forcer à la démission ou amener sa famille socialiste à lui trouver un successeur à la tête du gouvernement. Aujourd’hui commencent à Lisbonne les travaux d’une commission d’enquête parlementaire qui, pour la première fois depuis la fin de la dictature de Salazar, implique directement un Premier ministre. Et va le contraindre à comparaître physiquement, au mieux par écrit. «Le Portugal est un bateau ivre dans lequel le capitaine est le plus suspect de tout l’équipage», a asséné un chroniqueur de la chaîne privée SIC.
D’après les économistes, de tous les pays européens au bord du «décrochage», le Portugal est certainement le maillon le plus faible. Plus encore que la Grèce, le petit pays ibérique souffre de maux structurels, d’exportations en berne, d’une dette extérieure record et d’un déficit public de 9,3%. Bruxelles attend de Lisbonne des mesures concrètes pour respecter le «plan d’austérité» auquel José Sócrates s’est engagé. Mais ces mesures, qui promettent d’être draconiennes, se font attendre… D’autant que José Sócrates est encore affaibli par ses problèmes politico-judiciaires.
«réformateur». Ce qui ressemble fort à un procès politique est lié à un supposé cas d’interventionnisme. Pendant deux mois, un groupe de députés tentera de faire la lumière sur le rôle qu’a joué José Sócrates dans la tentative du géant Portugal Telecom (PT, contrôlé par le gouvernement socialiste) de racheter la télévision TVI, hostile au pouvoir. Il s’agit en somme de savoir si le leader socialiste a manœuvré pour placer la chaîne sous son joug. En juin 2009, devant le Parlement, Sócrates avait solennellement assuré ne rien savoir de telles tractations. Si cette commission d’enquête, qui va auditionner des dizaines de témoins, fait la preuve que le Premier ministre a menti, les jours de celui qui promettait de «transformer le Portugal en profondeur»seront comptés.
«Alors qu’il a pu être une partie de la solution pour le pays, Sócrates est aujourd’hui une partie du problème», résume José Manuel Fernandes, ancien directeur du quotidien de référence Público, dont le départ tient à ses relations tendues avec le leader socialiste. Comme d’autres nombreux détracteurs, Fernandes reconnaît que le tonitruant Sócrates a été, au début de son premier mandat - de 2005 à 2007 -, un chef de gouvernement courageux, qui a ramené un gros déficit à 3% (aujourd’hui de nouveau autour de 10%), réformé le système des retraites (âge légal et temps de cotisation augmentés), accru les recettes fiscales, créé 150 000 emplois, fait le ménage au sein de la haute administration… «Un bon bilan de réformateur volontariste, qui a su contenir à sa gauche et rassurer à sa droite, dit le politologue Manuel Villaverde Cabral. Il a mis à la porte pas mal de gens dans les hautes sphères, qui sont aujourd’hui autant d’ennemis.» Mais, si José Sócrates est autant ébranlé, c’est aussi parce que son parcours est jalonné de zones d’ombres et d’agissements suspects.
Depuis ses premiers pas municipaux dans la région de Beira Baixa, à l’est du pays, il a été mêlé à une dizaine de scandales. Un diplôme d’ingénieur obtenu dans des conditions suspectes, des permis de construire douteux accordés au sein de la municipalité de Castelo Branco, l’affaire «Face occulte» (des écoutes téléphoniques le lient avec un homme d’affaire véreux ayant un quasi-monopole sur les friches industrielles)… Ou encore l’affaire «Freeport», une société britannique ayant installé un centre commercial à Alcochete, en banlieue de Lisbonne, sur un terrain protégé… grâce au feu vert de Sócrates, alors ministre de l’Environnement ! «En réalité, à chaque fois, il n’y a aucune preuve formelle, dit José Manuel Fernandes. Mais rien n’est vraiment clair avec lui.»
jeune loup. Energique et charismatique, doté d’une audace qui a électrisé une vie politique ankylosée, José Sócrates apparaît aussi comme un leader intransigeant, autoritaire et irascible, dont l’ambition dévorante en irrite plus d’un. «Son parcours, c’est celui d’un jeune loup sans idéologie, opportuniste, un pur produit d’appareil qui a escaladé les échelons la tête froide, le décrit Fernando Rosas, historien et député du Bloc de gauche. Il a toujours eu un côté borderline. Et puis ses accès d’autoritarisme lui valent une piteuse image dans des médias qui ne sont pas tendres avec lui.» Sócrates le leur rend bien : plusieurs journalistes de télé vedettes (Mário Crespo, Manuela Guedes…) ont dénoncé «la censure» exercée sur eux par le Premier ministre. Une commission d’éthique s’est mise en place en janvier pour éclaircir la question. «L’un des grands problèmes de Sócrates, c’est qu’il a perdu le soutien des élites,analyse José Manuel Fernandes, l’ancien patron de Público. On ne lui fait plus confiance, tout le monde a peur d’être trompé par ce personnage trouble et ambigu.»
Dans un sérail politique dominé par des doctores, ce socialiste sans titre prestigieux agace et rompt avec le statu quo. A la manière d’un Sarkozy portugais, Sócrates est un fonceur, un communicateur zélé qui a phagocyté son parti et personnalisé à l’extrême l’exercice du pouvoir. Autres similitudes : il ne craint pas de tailler dans le vif, supporte mal les critiques, perd facilement ses nerfs et cultive la perméabilité entre la sphère politique et celle des affaires - à l’instar de Jorge Coelho, un de ses proches, ancien ministre socialiste entré avec sa bénédiction dans le conseil d’administration du géant du BTP Mota-Engil.
A force de jouer avec le feu, José Sócrates se retrouve-t-il sur un siège éjectable, six mois seulement après sa difficile réélection (une courte majorité au Parlement) et alors que sa cote de popularité chute allègrement ? «A priori, tous les éléments l’accablent, explique Ricardo Costa, directeur adjoint de l’hebdo Expresso.Heureusement pour lui, les circonstances le protègent.» De l’avis général, le président de la République, Cavaco Silva, mentor du grand parti de la droite (PSD), n’a pas intérêt à convoquer des élections anticipées. Par souci de stabilité institutionnelle, et aussi parce qu’un scrutin aujourd’hui ne changerait sûrement pas beaucoup la donne. Jusqu’à janvier 2011, date de la présidentielle, Sócrates ne risque donc pas sa peau. Sauf si, bien sûr, la commission d’enquête parlementaire qui s’ouvre aujourd’hui exige sa démission.
sacrifices. Même s’il reste en place, tous lui pronostiquent toutefois un chemin de croix jusqu’à la fin 2010. Après avoir concédé des largesses sociales, Sócrates va devoir appliquer d’ici peu le plan d’austérité dicté par Bruxelles via des coupes claires dans les dépenses sociales (santé, indemnités chômage, subventions, accès au RMI…). «Depuis dix ans, le pouvoir exige que les Portugais fassent des sacrifices, explique Manuel Villaverde Cabral, le politologue. Je ne crois pas qu’ils supporteront plus longtemps.»
José Sócrates, pris entre l’enclume sociale et le marteau financier ? «Il est pieds et poings liés, renchérit José Manuel Fernandes. Le modèle industriel portugais, vieux de cinquante ans, est moribond, et rien ne le remplace. Le pays ne produit qu’entre 30 et 40% de ce qu’il consomme. La marge de manœuvre de Sócrates est très faible.»
Pourra-t-il rebondir ? Ricardo Costa, de l’Expresso, et d’autres observateurs en sont convaincus : «Ce type a plus de vies qu’un chat. Il est très dur, très résistant, il sait encaisser les coups. Une vraie bête politique qui sait sortir ses griffes lorsqu’il est le plus affaibli.»